Mes silences

Publié le par nane528


Les plus grandes et profondes souffrances sont tues et il suffit d’une situation, d’un mot pour les mettre en éveil, réveiller en nous ce démon qui nous ronge et pollue notre moi intérieur. La plus grande partie de ma vie, j’ai tu mon malaise, ce mal qui comme un cancer grignote mon existence. Ces silences qui peuvent être interprétés comme des mensonges ont toujours été pour protéger ceux que j’aimais.



J’ai grandi et survécu et me suis construite tant bien que mal dans ce silence bien à l’abri d’une mère aimante que je ne voulais surtout pas éclabousser par les maux qui m’ont accompagnée depuis mon plus jeune âge. Les maux induits par la violence d’un père, je devrais plutôt dire d’un géniteur qui vomissait sur sa fille de 3 ans son propre malaise sous forme de coups, d’insultes et d’humiliations et qui menaçait son enfant de réserver le même sort à sa mère si elle osait en parler.  Alors très tôt, j’ai appris à me taire pour protéger le plus beau des cadeaux que la vie m’ait offerts : ma maman.


J’ai grandi et forgé mon caractère dans ce silence comme un refuge pour oublier les blessures et les coups. Souvent, j’ai essayé de briser ce mur, mettre des mots sur les maux afin de détruire les incompréhensions qui pouvaient s’immiscer dans ma vie avec mon entourage. J’ai livré une partie de cette souffrance pour me délester d’un poids qui m’empêchait d’avancer. Mais je n’ai libéré que le haut de l’iceberg, cette violence qui m’habitait et que j’abhorrais. Cette partie de moi qui n’était pas moi qui n’était que le reflet de cet homme que j’avais toujours eu en horreur. J’ai pansé certaines blessures en rompant une partie de ce silence en mettant des mots sur l’inacceptable. La petite fille coupable est devenue une victime. Aujourd’hui, j’ai appris à comprendre les mécanismes psychologiques qui ont conduit ce géniteur vers l’enfer de la maltraitance. J’ai compris, mais je ne peux pardonner l’intolérable.


Ce silence dans lequel je me suis réfugiée et qui encore aujourd’hui m’accompagne est à la fois mon plus grand ami et mon plus féroce ennemi. Un ami, car il m’a permis de survivre et de traverser l’existence sans tomber dans les travers pervers de l’alcool ou de la drogue et d’avancer, de faire semblant, de donner le change sur un bienêtre chancelant. Et un ennemi qui garde les blessures bien profondément en moi, gardien du temple des secrets qui détruisent à petit feu qui piétinent le bonheur qui se présente à la porte de l’existence, gardien des mots libérateurs qui refusent de naitre. Ne vous y trompez pas ces silences ne sont que des mensonges pour moi-même et non pour les Êtres que j’aime et que je respecte.


Anne
Illustrations du peintre Magrit

Publié dans Mes pensées

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D
<br /> <br /> La souffrance est une gangrène de l'esprit qui se traite difficilement, seule la volonté et une force d'esprit tenace peut la renvoyer dans cette partie obscur de notre être.<br /> <br /> <br /> Tu as été très fort psychologiquement malheureusement beaucoup n'a pas ton mental.<br /> <br /> <br /> <br />
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D
Je découvre aussi ce blog aujourd'hui et ce que j'y lit me trouble. Je suis restée longtemps dans le silence aussi mais j'ai appris à parler, à mettre des mots sur mes douleurs et je continue à avancer comme ça... C'est très beau ce que tu écris.
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C
L'absence de mots n'est pas un mensonge. Les silences ne s'entendent pas, ils s'écoutent...Très joli blog, bonne continuation. Céline
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A
Je découvre votre blog ce matin, par hasard... je me demande comment je suis arrivée ici d'ailleurs :-)Vos centres d'intérêt sont les miens... J'ai donc lu quelques-unes de vos pages et ce texte "silence" résonne en moi. Il dit ce que j'ai vécu aussi, sauf que maman était partagée et souvent du côté de la force plutôt que de soutenir son enfant... Mais c'est le passé... toujours vif pourtant.Merci !
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C
Très joli blog, je le mets dans mes favoris, A bientôt, Carole
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